Le Titre Professionnel Développeur Logiciel
Tout d’abord, merci à Yuyazz de me donner l’opportunité de poster sur son site mon avis sur le Titre Professionnel Développeur Logiciel. Pour ceux qui ne le sauraient pas, il s’agit d’un diplôme de niveau bac+2 délivré par certains organismes de formation pour adultes comme le GRETA ou l’AFPA, à l’issue de 8 ou 9 mois de cours.
Force est de constater que le web contient à ce jour très peu d’avis sur ce diplôme, et qu’il est donc difficile de s’en faire une idée. Ayant moi-même suivi cette formation il y a quelques mois, je vais tenter de combler (un peu) ce vide. Pour information, j’ai suivi la formation auprès du GRETA TPC, donc tout ce qui suit concerne cet organisme en particulier, je ne connais pas les autres. Je vais tenter d’être assez complète, alors si vous voulez la version courte, la voici :
le titre ne fait pas de vous un développeur, mais il vous donne les outils pour le devenir. C’est à vous de les utiliser à bon escient pour creuser les points que la formation n’aborde pas.
Si vous préférez la version longue, je vous invite à lire la suite.
Tout d’abord, une question que je me suis moi-même posée il y a quelques temps était de savoir si le titre avait une réelle valeur (= concrètement est-ce qu’on trouve un emploi de développeur avec le diplôme). En ce qui me concerne, j’ai trouvé un CDD après deux/trois mois de recherche (j’habite en province). Cependant, mon employeur a vite estimé que mon diplôme n’avait pas la valeur d’un DUT (bac+2 également). Pourquoi ? Car, je le cite, ma formation est « incomplète ». Je sais faire du PHP pur, très bien, mais je ne suis pas familière des design patterns, je n’ai jamais vraiment touché à un framework ou à un CMS ni manipulé Ajax ou jQuery par exemple. Selon lui, c’est pourtant « la base ». Du coup, je n’étais pas aussi opérationnelle qu’il se l’était imaginé… À titre personnel, je pense que cela n’est pas vraiment lié au diplôme : quelles que soient nos compétences, quand on débute dans une nouvelle entreprise et à plus forte raison dans un nouveau métier, on ne peut pas être un super pro autonome en 24h… Cela dit, il est vrai que si j’avais eu une formation de deux ans et non de quelques mois, j’aurais eu le temps de manipuler davantage d’outils et ainsi de me sentir plus à l’aise.
En réalité, le titre ne fait pas de nous des développeurs, en revanche il nous donne toutes les clés en main pour avoir les moyens d’apprendre à être développeur. Certes, les éléments clés manquants (manipulation de frameworks PHP, de JavaScript et ses bibliothèques, notions sur les OS, utilisation de logiciels de gestion de versions, etc) se rattrapent en autodidacte, mais on ne peut pas dire qu’on est automatiquement « développeur » si on décroche le titre. Nos capacités à l’être dépendent uniquement de l’investissement personnel de chacun, que ce soit avant, pendant ou après le titre.
Le titre en lui-même n’a pas une grande valeur. Il atteste que vous savez à peu près aligner 3 lignes de code, et que vous êtes suffisamment à l’aise à l’oral pour en parler. Car oui, pour moi une grande source de frustration tout au long de la formation c’est ça : les cours sont très durs à suivre, mais une fois arrivés aux évaluations, on vous demande à peine le dixième de ce que vous avez appris. L’exemple du SQL est parlant : en cours on enchaîne plusieurs sous-requêtes imbriquées qu’on a beaucoup de mal à faire en s’y mettant à plusieurs, et lors de l’évaluation on vous demande des requêtes très basiques (d’ailleurs ça a induit certaines personnes en erreur, tellement la simplicité de l’exercice les a surpris). Pour le PHP, je me rappelle que tout le monde était « stressé » avant et pendant l’évaluation, parce que c’était pas évident de produire le programme voulu dans le temps imparti… au final même si le programme rendu ne tournait pas et ne répondait pas à la moitié de la consigne, on validait quand même la matière parce que l’idée était à peu près là et qu’on utilisait quelques mots clés… Donc, clairement les notes n’ont aucune valeur, c’est à vous de vous évaluer et de juger seul de votre niveau. Je sais que certains ne seront pas d’accord avec moi, mais personnellement je le ressens comme ça.
Concernant les cours et les formateurs, on a de tout :
– ceux qui s’en fichent, dont le cours consiste uniquement à vous donner des polycopiés parsemés d’erreurs sans les explications qui vont avec, et dont on va jusqu’à douter de leurs compétences dans la matière enseignée.
– ceux qui sont compétents mais dont la matière n’a pas de réel lien avec le métier de développeur (savoir rédiger une note de service…). Après chacun peut y trouver un intérêt personnel, comme pour le cours sur les techniques de recherche d’emploi par exemple, mais la formation étant TRÈS courte, beaucoup de ces cours gagneraient à être zappés au profit de cours plus techniques…
– et enfin les formateurs intéressés et intéressants qui remontent le niveau.
Le même formateur assure les cours de PHP / Java, et JavaScript le cas échéant. Autant dire que la qualité de la formation repose sur ses épaules ! Pour le moment, c’est un point fort en ce qui concerne le GRETA TPC car le formateur en question est efficace et compétent, mais si un jour ça change, cela pourrait être catastrophique.
Au niveau des cours, on en a donc quelques-uns plus ou moins inutiles (je parle uniquement par rapport au métier de développeur), comme l’utilisation poussée de Word ou la communication. Mais certains cours « techniques » seraient également à enlever. Là je pense en particulier à la formation sur Java : le langage étant trop survolé, on ne dispose pas « des billes » pour l’utiliser professionnellement. J’aurais donc très largement préféré utiliser ces heures d’enseignement pour voir un framework PHP par exemple.
Bien entendu, ça ne veut pas dire que je n’ai pas trouvé ce cours intéressant, loin de là. En fait, tous ces cours auraient leur place si la formation durait 2 ans, mais sont plutôt malvenus dans une formation condensée de quelques mois, dont le but est de nous rendre opérationnel au plus vite. On apprécierait davantage d’enseignements techniques directement applicables dans notre futur métier.
Si je peux vous donner quelques conseils concernant les conditions nécessaires pour réussir le titre (attention, là je ne parle pas d’obtenir le diplôme, mais d’être à l’aise pour suivre les cours, et d’avoir le sentiment personnel d’avoir compris, ce qui est très différent), je pense à plusieurs choses :
– la première, c’est qu’il faut être un minimum passionné. Si vous vous retrouvez là par hasard, je ne dis pas que la réussite est impossible, elle est simplement très difficile. On est immergés dans la formation de manière intensive, et il est facile de se décourager si on n’a pas VRAIMENT envie de réussir dans ce domaine particulier. Sincèrement, je ne me serais pas sentie capable d’abattre autant de travail dans un domaine qui ne m’aurait motivé qu’à moitié.
– une deuxième chose, je l’ai déjà brièvement évoqué, c’est, dans la mesure du possible, un investissement personnel à avoir AVANT la formation. Autrement dit, ne pas arriver en cours en n’ayant jamais vu une ligne de code. Tout d’abord, parce que ça permet de savoir si cela nous plaît avant de nous lancer dans une réorientation (c’est quand même lourd !), et surtout parce que ça permet de suivre en cours sans être perdu dès le premier jour. Attention, je ne parle pas de savoir coder, juste d’avoir déjà regardé quelques tutoriels sur le net par exemple. L’idée est que lorsque vous entendrez parler d’une notion, elle ne vous sera pas totalement inconnue, et vous l’intégrerez plus vite. Là encore, comme pour le point précédent, il est tout à fait possible de réussir sans rien connaître avant d’entrer en formation, c’est simplement beaucoup plus difficile.
– la troisième chose, c’est un investissement personnel constant à avoir tout au long de la formation. Par constant, j’entends qu’il faut s’exercer « tous les soirs ». Il arrive régulièrement qu’on ait quasiment qu’une seule et même matière pendant plusieurs semaines d’affilée. Ainsi, si on ne comprend pas le cours d’une journée, on ne comprendra pas le suivant, etc. Et une journée de cours, c’est rattrapable en une soirée, deux journées ça devient difficile, et au-delà… en fait, c’est comme pour les autres points finalement, ça n’est pas impossible, juste très dur. Pour moi, il ne faut jamais faire l’erreur de se dire « ce soir je ne fais rien », c’est un gros piège à éviter.
Voilà, je terminerais en disant que ces quelques lignes constituent un avis totalement personnel et qui n’engage que moi. J’espère néanmoins que cela pourra éclairer les personnes qui s’interrogent sur le titre DL.
Julie Nuguet